jeudi 7 avril 2011

Pierre Tanguy(Poète) honore son ami Jean Pierre Boulic au salon livr arts

Hommage à l’œuvre de Jean-Pierre Boulic

(intervention de Pierre Tanguy au Salon Livr’Arts de Plomelin, le 3 avril 2011).



Jean-Pierre Boulic vient d’obtenir, à l’occasion de la publication de son recueil « Patiente variation », aux éditions rennaises La Part commune, le prix de poésie Louis Montalte pour l’ensemble de son œuvre. Ce prix est attribué tous les ans par la Société nationale des gens de lettres. Il a été obtenu en 2009 par Jean-Claude Pirotte, en 2008 par Jean-Luc Steinmetz, en 2005 par Robert Sabatier. C’est dire l’importance de ce prix qui honore, chaque fois, de grands auteurs.

L’ œuvre actuelle de Jean-pierre Boulic, c’est une quinzaine de recueils dont les plus récents édités en Bretagne. Ce sont ces recueils que je voudrais évoquer devant vous. Et, d’abord, ceux, magnifiques, publiés en bilingue français-breton (e brezoneg gand Job an Irien) aux éditions Minihi Levenez à Treflevenez dans le Finistère. Il s’agit de « Royaume d’île » (Rouantelez an enezenn) de « Une île auprès des ciels » (Eun enezenn tost d’an oablou) et du « Chant bleu de la lumière » (Kan glaz ar sklerijenn). Trois recueils marqués par le voisinage d’Ouessant et de Molène, illustrés par des photos de l’auteur ou de Marie-Hélène Grange. Jean-Pierre Boulic vit, en effet, dans le pays d’Iroise, à Trébabu. Son écriture est trempée dans le sel et dans l’iode, mais aussi dans le sève des arbres et des fleurs qui l’environnent.

A ces trois recueils bilingues et illustrés, il faut ajouter les trois livres que Jean-Pierre Boulic a publié aux éditions La Part commune, à Rennes. « En marchant vers la haute mer » (2008), « Patiente variation » (2010), « Un petit jardin de ciel » (2011). Trois recueils où le poète léonard trouve toute sa mesure, dans une écriture plus intimiste, plus intériorisée, proche de toutes nos angoisses, mais surtout de nos émerveillements, notamment ceux venus de l’enfance.

Je voudrais vous dire pourquoi j’aime la poésie de Jean-Pierre Boulic et vous donner quatre bonnes raisons de le lire.
- D’abord, c’est la simplicité dans l’écriture. Ce qui n’exclut pas, bien au contraire, de la profondeur, mais une simplicité qui lui permet de toucher un large public. Je dirais même un public populaire, quand on voit le succès qu’il rencontre dans les salons du livre ou les ventes-signatures. On est loin de la poésie hermétique, faite pour les auteurs qui se lisent entre eux.













- Sa poésie est concrète. Ses mots sont puisés dans la réalité la plus proche. Pas d’abstraction. On sait que le Breton, quand il écrit, fuit l’abstraction. La langue bretonne est concrète et imagée. Elle l’est aussi quand des auteurs bretons s’expriment en français.
- Sa poésie est enracinée dans un lieu, dans un territoire. Mais sans régionalisme étroit. Sans passéisme. Une poésie qui, parce qu’elle est enracinée, dit l’universel. Jean-Pierre Boulic est devant la mer comme Philippe Mac Léod l’est devant sa montagne pyrénéenne.
- Enfin, et c’est le plus important à mes yeux. Il y a chez Jean-Pierre Boulic cette conviction que la création n’est ni vide, ni obscurité, mais qu’elle procède d’une parole d’illumination et de joie. A contre-courant d’une littérature du vide et de l’abject. A sa manière, le poète finistérien est fidèle l’injonction de Novalis, reprise ensuite par Gustave Roud et Philippe Jaccottet : « Recueillir sur terre les morceaux de paradis aujourd’hui épars ». Il faut pour cela, au poète, la capacité de traquer l’invisible dans le visible, et de rentre compte du mystère de l’existence. D’être un homme aux aguets, un veilleur, capable d’émerveillement. C’est le don que détient Jean-Pierre Boulic.

En conclusion, s’il fallait établir une parenté avec d’autres grands poètes bretons, je dirais Eugène Guillevic pour la concision et le caractère affûté du langage. Et Gilles Baudry, le moine-poète de Landévennec, pour la spiritualité discrète. Mais Jean-Pierre Boulic a sa propre voix. Et, à ce titre, on peut se réjouir d’avoir un grand poète vivant parmi nous (car tous les grands poètes ne sont pas uniquement dans les dictionnaires). Un poète qui n’a sans doute pas fini de nous enchanter.

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