vendredi 27 avril 2012



                                                     Présentation d’Olivier Cousin par Pierre Tanguy

                                         (Plomelin, 1er avril 2012)                                     





     Vous parler d’Olivier Cousin aujourd’hui est pour moi un réel plaisir. D’abord parce que Olivier est déjà un auteur qui compte en Bretagne (mais nous en reparlerons). Mais aussi parce qu’il est professeur de lettres dans le collège et lycée de Lesneven où j’ai fait mes propres études. Mes « humanités classiques » comme l’on disait à l’époque. C’est dire que nous avons au moins quelques horizons communs: le plat pays léonard certes, mais aussi le rugueux littoral du pays Pagan, du côté de Plounéour-Trez et de Brignogan, avec son ciel changeant. Loin du ciel « sans paupière » du dernier recueil d’Olivier.

    Olivier est né à Brest rue Neptune, mais il habite Lesneven dans un quartier, proche de la campagne, où les rues portent des noms de poètes. Le veinard. Pour lui, c’est rue Anjela Duval. J’avoue que je l’envie beaucoup de résider ainsi dans une rue qui honore la grande poétesse tregoroise.
    L’œuvre déjà importante d’Olivier Cousin est, d’abord, marquée par l’éclectisme. On trouve des romans, des livres pour enfants, des livres d’artistes, des recueils de poèmes, des participations à des anthologies et des publications en revue.    Olivier Cousin  est un auteur prolixe. « Toujours des mots au fond de la poche » : c’est la formule à l’emporte-pièce qui inaugure son blog. Un blog où il dit, à juste titre, que ses thèmes privilégiés sont sa Bretagne natale, les pays celtiques et d’autres pays, la création artistique, le patrimoine. Le titre d’un de ses quatre romans « Les enchaînés de Landouzan » le montre bien. Mais aussi son bel album « Rêves de pierre » consacré aux sculptures de bateaux et navires que l’on trouve sur des édifices ou monuments bretons.   Son attachement à la création artistique le fait travailler en lien avec d’autres créateurs : Anne Salaün pour les illustrations des ses deux petits livres pour enfants (« Drôle de bestiaire de la mer » et « Drôle de bestiaire du dictonnaire »), Jean-Pierre Blaise pour ses « Rêves de pierre » ou pour un livre d’artiste intitulé « Même les amers sont fragiles ». Il y eu aussi à noter cette collaboration avec l’artiste Jean-Yves André dont les eaux-fortes illustrent « La lune pour six écus ».    J’ajouterai qu’Olivier Cousin cultive volontiers la confraternité entre auteurs puisqu’il a été la cheville-ouvrière de deux ouvrages collectifs donnant carte blanche à des écrivains bretons pour décrire leur lieu de prédilection. Premier tome intitulé « En Bretagne ici et là, 40 lieux, 40 auteurs ». Deuxième tome : « Regards sur la Bretagne ». 40 auteurs sollicités également.     Mais si nous sommes avant tout réunis aujourd’hui pour parler d’Olivier, c’est pour saluer le prix qu’il a obtenu l’an dernier :le prix de poésie Camille Le mercier d’Erm de l’association des écrivains bretons, pour un recueil intitulé « Sous un ciel sans paupière », publié aux éditions rennaises La Part commune.
    Interrogé par un quotidien régional après l’attribution de ce prix, Olivier Cousin déclarait. « Cet ouvrage est celui auquel je tiens le plus en terme de contenu, celui qui me ressemble le plus en quelque sorte ».    Celui qui me ressemble le plus : cela mérite qu’on s’y attarde.

     Dans une chronique que j’avais rédigé à l’occasion de la sortie de son livre, j’avais personnellement noté que loin, très loin de son nord-Finistère natal, l’auteur s’employait à nous parler de mondes qui n’ont pas les mêmes saveurs ou les mêmes couleurs que le nôtre : la Grèce, l’Italie, l’Espagne, la Turquie… De paysages méditerranéens, qu’il nous présente en alliant habilement  repères mythologiques et scènes de la vie contemporaine. Sur un ton détaché,  parfois badin voire trivial. Sans jamais se prendre au sérieux. Comme s’il sortait d’escapades touristico-historiques (« On a beau s’être rincé/ l’œil à Corinthe »)
     Mais Olivier,  au bout de son périple, posait la bonne question : « Cela rime à quoi/de lire sa vie/dans les feuilles d’olivier/quand on est né sous un hêtre ? ». Car l’Odyssée moderne d’Olivier Cousin – on l’aura compris - est aussi, et surtout, une manière détournée d’aller à la recherche de ses propres racines.

     Aller loin pour se (re)trouver. Rien de bien original. Sauf quand un poète tente d’établir des passerelles entre ici et là-bas. Et le réussit. Embarquant pour une île du Ponant, Olivier Cousin note : « Crachinage matinal/à l’embarquement pour Ouessant/ Ni verte ni bleue mer glauque/ couleur de feuilles d’olivier ». Faisant le lien avec la mythologie grecque, il note : « Je n’oublie pas/que notre domicile à ma naissance/était sis à Brest rue Neptune »

     Aujourd’hui, à mes yeux, cette quête d’identité va au-delà du fait de savoir ce qu’il en est de ses racines bretonnes.

   C’est sans doute son identité d’auteur qui, en réalité, est en jeu. Olivier conservera-t-il son éclectisme éditorial actuel ? Ou bien le verra-t-on emprunter prioritairement la voix exigeante de la création poétique ? Je parie, personnellement, sur cette deuxième option.

    Olivier Cousin va continuer à « Puiser aux mondes » (titre magnifique de son premier recueil) avec « une poésie qui ne joue pas à l’être ou, si l’on préfère, qui ne se la joue pas » comme l’écrit le poète quimpérois Marc le Gros dans sa préface à « Un ciel sans paupière ».

    S’il faut situer aujourd’hui Olivier Cousin, pour ceux qui ne l’ont pas encore lu, disons qu’il est plus proche de Keineg que de Grall ou Le Men. Mais sa voix est particulière. A l’approche de la quarantaine, il n’a pas sans doute pas fini de nous surprendre et de nous faire partager ses émotions. Dans « Puiser aux mondes », il écrit : « En Bretagne nul besoin de boussole/ - autant cartographier à fond le cœur qu’on aime ! -/pour dénicher son ailleurs,/trouver lieux et échanges qui consolent ».

   
                                                                                                             Pierre TANGUY

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